Le combat des élus

Le combat des élus

De Jean Pellerin

Le texte ci-dessous est une critique du journaliste Jacques Huray, parue dans Le Nouvelliste, mai 1951.

Une fois de plus, les Compagnons de Notre-Dame ont su surmonter les obstacles pour obtenir un nouveau triomphe, cette fois-ci dans une création tout à fait inusitée ; "Le Combat des élus", une oeuvre dramatique en un prologue et trois tableaux de Jean Pellerin, un membre de la troupe.

Comédiens, metteurs en scène et décorateurs ont réussi une superbe réalisation technique où tout converge vers l'unité, la mise en relief des caractères et de l'ambiance pour atteindre le but ultime que se propose le théâtre ou tout oeuvre d'art : l'élévation de l'esprit et de l'âme sur le piédestal élevé où trône la beauté, splendeur du vrai et de l'être.

En début de la rigueur du sujet, et l'âpreté et de la longueur de plusieurs scènes, il est infiniment agréable de voir évoluer les personnages au milieu des splendides décors conçus par André Biron et réalisés par Marcel Roux et le magnifique jeu d'éclairage qui met parfaitement en évidence tout ce qui se passe derrière le rideau.

On connaît depuis longtemps le talent de metteur en scène de Gérard A. Robert. On peut dire que le "Combat des élus" a été pour lui l'occasion de passer au rang des maîtres, que cela soit dit sans blesser sa modestie. D'ailleurs maints connaisseurs du théâtre l'ont déjà affirmé et la réalisation de l'oeuvre de Pellerin ne vient que confirmer leur assertion.

"Le Combat des élus" a révélé un autre jeune artiste de Trois-Rivières : André Biron, dont les talents de dessinateur étaient déjà connus parmi les membres et les habitués de la troupe. Cette fois-ci, c'est lui qui a conçu les décors à la fois simples et suggestifs, du prologue et des trois tableaux. Nous reviendrons d'ailleurs sur ce sujet la semaine prochaine.

Et les interprètes? Toute la distribution, du moins tous les rôles principaux, sont à la hauteur de leur tâche. Dans l'ensemble, le jeu cadre magnifiquement avec l'esprit de la pièce qui est empreinte, dans les trois principaux actes, d'une atmosphère de mysticisme et de lutte avec les puissances infernales.

Léo Benoît, dans le rôle du Père Frédéric, est une inspiration pour ses compagnons d'armes. Ses réparties sont écrasantes, il sait pourtant maîtriser la situation avec art et retenue, ordonner chacun de ses gestes et se façonner une personnalité à la fois douce et exquise. Jean-Guy Ferron, son compagnon de cloître, a trouvé la juste attitude monacale qui convient à son Père Augustin et la sobriété de son jeu a été à bon droit remarquée.

André Cartier a créé un Satan nouveau style, bien plein de prévenances. Avec le temps et l'expérience, son talent aura lieu de s'affirmer davantage. Jacqueline Morin a su se faire aussi insinueuse que possible, se créant en quelque sorte des attitudes chorégraphiques dans son personnage de la Vanité : Pierre Lajoie a campé un M. Ledieu imposant et sympathique, Mlles Philomène Moreau et Renée Gagnier ont admirablement bien servi la cause grâce à leur expérience de la scène. Enfin, MM. Marcel Roux, André Biron, et Mlles Louise Lajoie et Eva Gagnier ont donné du rythme et de la vie au prologue. MM. Antonio Mondor, Fernand St-Cyr Roger Richard et Mlle Juliette St-Hilaire ont bien figuré de même que MM. Louis-Philippe Poisson, Guy Parent et Mme Edmée St-Yves. Faisons remarquer en passant que le choeur est beaucoup trop long et sonne faux.

En dépit que le "Combat des élus" ne soit pas une oeuvre strictement théâtrale et que la pièce aurait avantage à être retouchée, les Compagnons ont fait encore une fois preuve de leur savoir-faire. Ils peuvent se présenter sans crainte sur les grandes scènes de l'étranger.

Salle Notre-Dame
Les 2 et 7 mai 1951 à 19 h 30
Les 8, 9 et 10 mai 1951 à 20 h 30
Mise en scène
Comédiens
  • Léo Benoît
  • André Biron
  • André Cartier
  • Jean-Guy Ferron
  • Eva Gagnier
  • Renée Gagnier
  • Louise Lajoie
  • Pierre Lajoie
  • Antonio Mondor
  • Philomène Moreau
  • Jacqueline Morin
  • Guy Parent
  • Louis-Philippe Poisson
  • Roger Richard
  • Marcel Roux
  • Fernand St-Cyr
  • Juliette St-Hilaire
  • Edmée St-Yves
Décors
  • André Biron
  • Marcel Roux